Home » Normandie 2024 » SUJET 10: Opération Goodwood - GB » Un Sherman crab franchi l’Orne

Un Sherman crab franchi l’Orne

UN SHERMAN CRAB SUR L'ORNE

Bonjour chers amis lecteurs et bienvenue à tous.

Dans cet article, je vous présente le montage en diorama d’un Sherman Mk V Crab I et d’une portion de pont Bailey au 1/35.
La mise en scène de ce diorama est inspirée par la photo historique ci-contre montrant un Sherman Crab franchissant l’Orne sur un pont Bailey dressé au-dessus du fleuve au nord de Caen à la mi-juillet 1944 dans le cadre de l'opération Goodwood.

Le char qui sera représenté sur ce diorama est un Sherman Mk V Crab du 1st Lothians and Border Horses Yeomanry (AoS 52), de la 79th Armoured Division Britannique. Il sera mis en situation sur une portion de pont Bailey désigné London Bridge, qui pour la petite histoire fût le tout premier pont Bailey à être déployé en Normandie.

 

En préambule du montage détaillé de ces deux maquettes et afin de contextualiser ce diorama, je reviendrai en détail sur les faits historiques liés aux deux protagonistes.

Tout d'abord le Sherman Crab, pièce principale du diorama. Issu de l'imagination fleurissante du général britannique Percy Hobart, mais dont la genèse est bien plus ancienne. On évoquera également la 79th Armoured Division Britannique, berceau des Hobart's Funnies.

Enfin, l'opération Goodwood. Opération montée dans les premiers jours de la bataille de Normandie avec pour objectif de repousser l'armée hors de la ville de Caen, ville qui était initialement l'objectif du jour J. Ceci nous permettra de faire le lien avec les pont Bailey, autre merveille de l'ingénierie d'outre-manche dont les premiers éléments ont été déployés en Normandie dans le cadre de l'opération Goodwood.

 

	Sherman Crab franchissant l'Orne sur un pont Bailey, Normandie, Juillet 1944

SIR PERCY HOBART ET SES FUNNIES

Sir Percy Hobart (1885-1957)

Vétéran du premier conflit mondial, Percy Hobart était un ingénieur militaire britannique qui s'est illustré dans la création et la mise en œuvre d'engins blindés du génie au sein de la 79e division blindée dont il était le commandant pendant la Seconde Guerre mondiale. Dans la mémoire collective, ces engins ont d'ailleurs emprunté son nom puisque connus sous l'appellation de Hobart's Funnies.

Percy Hobart dont le surnom était Hobo était le beau-frère du Field Marshall Bernard Montgomery. Il reçut les distinctions suivantes:

  • Chevalier commandeur de l'Ordre de l'Empire britannique,
  • Legion of Merit,
  • Compagnon de l'Ordre du Bain,
  • Ordre du Service distingué,
  • Croix militaire.

Les Hobart's Funnies

L'histoire commence immédiatement après l'échec de l'opération Jubilee et du Raid de Dieppe mené le 19 août 1942 par les armées Britannique et du Commonwealth des éléments de l'armée US ainsi que quelques représentants de la France Libre. Les leçons tirées de cet échec vont notamment permettre aux Britanniques de mieux préparer l'opération Overlord et le débarquement sur les plages Normandes.

C'est dans ce cadre-là que Percy Hobart va développer toute une série d'équipement à adapter sur des véhicules blindés existants (principalement des Sherman et des Churchill) et qui devront participer au débarquement et à la bataille de Normandie en appui de l'infanterie et des autres armes blindées.

Comme évoqué plus haut, l'échec du raid de Dieppe avec ses lourdes pertes: 1200 hommes tués, 2000 faits prisonniers, sans oublier une centaine d'avions abattus,

une trentaine de chars perdus et un destroyer coulé a permis de mettre en lumière le manque de préparation pour une opération aussi spécifique qu'un débarquement sur une plage. Sans compter que pour ce raid, seuls 6153 soldats alliés ont été déployés, alors que pour l'opération Overlord, c'est 150 000 hommes le 06 Juin et plus d'un million d'hommes au cours des cinq premier jours qui débarqueront sur les plages Normandes.

En exemple de ces déboires on peut citer le cas du char Churchill. Le raid de Dieppe était l'occasion des premiers faits d'arme du tout nouveau char lourd Britannique. Cette première expérience du feu fût une déroute totale. Les 40 tonnes du Churchill ne lui autorisant pas de se mouvoir sur la plage de Dieppe, les chenilles ripant sur les galets. Cette situation explique le nombre de ces chars abandonnés sur la plage malgré que ces derniers soient en parfait état de marche. Pour l'anecdote, les Allemands récupéreront ces chars en état de marche pour pouvoir étudier ce tout nouveau char Churchill.

Bien évidemment, les raisons de l'échec de l'opération Jubilee ne demeurent pas uniquement dans ces simples explications mais sont bien plus complexes. Si vous souhaitez en découvrir plus sur le sujet, je vous renvoie vers la vidéo ci-dessous.

 

Officier de la Luftwaffe posant devant du char Churchill sur la plage de Dieppe - Source: World War Photos
Un char Churchill Mk III inspecté par des officiers Allemands après le raid de Dieppe - Source: World War Photos

Afin de ne pas reproduire ces erreurs lors du grand débarquement pour l'ouverture du second front européen, les ingénieurs du Royal Engineers,

Percy Hobart à leur tête vont plancher sur des dispositifs qui permettront le nettoyage, la circulation et le franchissement des hommes et des véhicules sur les plages du débarquement.

Ne disposant pas du suffisamment de temps et de moyens pour développer de nouveaux engins dans leur intégralité, ça sera donc sur la base de véhicules existants que des dispositifs spécifiques seront installés. Les deux chars de prédilection pour ces adaptations sont le Churchill Britannique et le Sherman Américain.

Pour accueillir et encadrer tous ces nouveaux engins du génie, la 79e division blindée britannique fût créé le 14 Août 1942. Très rapidement, le commandement Britannique ainsi que le Premier Ministre Winston Churchill sont très réceptifs et apportent leur soutien à cette mission relative aux blindés du génie.

L'étonnante série de chars aux silhouettes inhabituelles sur un champ de bataille fut surnommée par dérision les « funnies », puis baptisée à partir du nom de son initiateur, les Hobart's funnies.

Début 1944, Hobart put faire la démonstration à Eisenhower et à Montgomery d'une brigade de quelques 'un de ces chars modifiés.

Montgomery fut rapidement convaincu qu'ils seraient nécessaires aux forces américaines et leur « offrit » la moitié de tous les véhicules disponibles. Eisenhower était pour l'utilisation des chars amphibies mais laissa la décision des autres versions au général Omar Bradley qui, lui-même, la délégua à ses officiers. Ces derniers ne retinrent aucun des autres concepts parce qu'ils pensaient qu'ils exigeraient une formation spécialisée complémentaire et plus de soutien.

Char US M4A1 (75) DD à St. Fromond, secteur Omaha Beach

C'est donc sur les plages Britannique de Juno, Gold et Sword aux que les Hobart's Funnies seront majoritairement déployés.

L'efficacité de ces chars sur les plages lors du débarquement, leur permettra de prolonger leur présence au sein des forces alliés en Normandie mais aussi sur d'autre fronts tel que pour le débarquement en Provence en Août 1944. Des véhicules comme le Sherman Crab et son dispositif anti-mine seront utilisés jusqu'à la fin du conflit.

Les Hobart's Funnies sont à l'origine des véhicules blindés du génie moderne qui équipent toutes les grandes armées du monde. De nos jours, les Royal Engineers continuent à employer les chars modifiés Centurion et Chieftain.

LA MENAGERIE D'HOBART

Voici une sélection des véhicules les plus emblématiques issue du travail du Royal Engineers.

Sur la base du Churchill:

Le AVRE (Armoured Vehicle, Royal Engineers)

Adaptation du char Churchill, gardant les grandes lignes de ce dernier, le AVRE voit son canon principal remplacé par un mortier de 230 mm. Celui-ci tirait un projectile de 18 kg à environ 137 mètres et se rechargeait de l'intérieur du char au rythme habituel de 4 par minute. Le projectile, très explosif car au napalm, était capable de détruire des obstacles tels que des barrages routiers et des bunkers.

Le AVRE Bobbin

Sur la base du Churchill AVRE précédent, le Bobbin était équipé d'un tapis de 3m de large en toile renforcée et barre d'acier enroulé sur un rouleau qui surplombait le glacis avant du char. Ainsi le tapis se déroulait pour permettre le passage du char lui-même et des autres véhicules qui le suivaient sur le sol meuble des plages.

Le AVRE Fascine

Toujours sur la base d'un Churchill AVRE, ce char emportait sur sa plage arrière une fascine, un énorme fagot de 1,8 à 2,4 m de diamètre sur 3,3 m de large qui pouvait être déposé pour combler un fossé ou pour former une marche pour le passage des autres chars.

Le AVRE Small Box Girder

Le Small Box Girder était un char qui transportait un pont d'assaut d'environ 10 m de long en port à faut à l'avant de sa caisse. Le déploiement du pont pouvait se faire tout en gardant l'équipage du char à l'abri. Une fois en place, il permettait le franchissement d'un large fossé. La capacité de charge était de 40 tonnes.

Le Bullshorn Plough

Il s'agit d'un modèle de déminage sur base d'un char Churchill qui dispose d'une véritable charrue qui creuse le sol et démine vers l'extérieur sans les faire exploser. Une fois les mines déminées, elles doivent être désarmées par les sapeurs.

Le Double Onion

Un cadre fixé à l'avant du char sur lequel étaient fixées des caisses d'explosifs. Dédié à la création de brèche sur des murs en béton. Une fois arrivés à la cible, les crochets situés sur le dessus du cadre maintiendraient l'oignon dessus, et le cadre s'abaisserait afin que le char puisse se retirer à une distance de sécurité avant la détonation.

L’ARK ou ARC (Armoured Ramp Karrier ou Armoured Ramp Carrier)

La version Churchill ARK, sans tourelle est équipé de rampes extensibles à chaque extrémité. Il peut déployer ses rampes au-dessus d'un fossé ou d'un mur antichar, permettant à l'infanterie et aux véhicules de franchir l'obstacle. Il peut également combler le fossé lui-même, d'autres véhicules ou le passage des troupes directement sur son châssis.

Sur la base du Sherman

Le Crab

Le Crab était un char de déminage Sherman M4 modifié, équipé d'un fléau à mines. Le fléau du Crab était un cylindre rotatif où étaient fixées 43 chaînes lestées qui faisaient éclater les mines au passage du char. Un bouclier anti-souffle entre le fléau et le char donnait une protection supplémentaire lors de l'explosion des mines.

Le DD (Duplex Drive)

Char amphibie Sherman M4 capable de flotter grâce à une jupe imperméable en caoutchouc abaissable et de se mouvoir au moyen de deux hélices jusqu’à la terre ferme après avoir été lancé d'une barge de débarquement (Landing craft tank, LCT) au large de la plage.

LA 79e DIVISION BLINDEE BRITANNIQUE

La 79e division blindée: une division spécialisée

Tous ces nouveaux engins n'étant pas encore entièrement concrétisés, il faut déjà songer à l'organisation à mettre en place pour les intégrer au sein des forces du débarquement. C'est finalement une toute nouvelle division, la 79e division blindée qui a été initialement formée le 14 août 1942 comme une division blindée conventionnelle servant au Royaume-Uni sous le commandement du Nord. Elle comprenait la 27e brigade blindée, la 185e brigade d'infanterie et le QG Royal Artillery. En Octobre 1942, le major général Percy Hobart en prit le commandement.

En mars 1943, le général Sir Alan Brooke, chef d'état-major impérial confie au major général Percy Hobart le rôle de développer et de former une division de véhicules blindés spécialisés qui participeraient à l'invasion de la France en 1944. Ainsi l'unité d'infanterie et les régiments d'artillerie furent tous supprimés en avril 1943. Par la suite, ses unités du génie furent supprimées en novembre 1943. Ainsi la 79e division blindée s'organise en une formation blindée spécialisée de l'armée britannique créée dans le cadre des préparatifs de l'invasion de la Normandie du 6 juin 1944.

Écusson de la 79e division blindée britannique

La 79e Division Blindée du jour J

Par sa spécialisation, la 79e Division Blindée Britannique était toute destinée participer aux premières vagues du débarquement en Normandie, l'Opération Overlord. La division était sous le commandement direct du 21e groupe d'armées, des parties étant placées en soutien de la deuxième armée.

Elle se composait de:

  • Du 1st Assault Brigade and Assault Park Squadron RE, qui réunit tout le parc de véhicules sur la base du Churchill et du Churchill AVRE, regroupant le:
    • 149 Assault Park Squadron, RE
    • 5th Assault Regiment RE
    • 6th Assault Regiment RE
    • 42nd Assault Regiment RE

  • Du 30th Armoured Brigade qui regroupait toute les unités de Sherman Crab, elle était composée de:
    • 22nd Dragoons,
    • 2nd County of London Yeomanry (Westminster Dragoons),
    • 1st Lothians and Border Horse

Les missions du jour J

Les deux escadrons d'assaut du 5e régiment d'assaut et du 6e régiment d'assaut des Royal Engineers seront intégrés à chacune des trois divisions d'infanterie impliquées dans le premier assaut sur le front britannique et canadien - Gold Beach, Juno Beach et Sword Beach.

L'objectif de chaque paire d'escadrons d'assaut était de dégager des voies à travers les plages et d'établir jusqu'à huit sorties des plages sur la première route intérieure, adaptées aux véhicules à chenilles. Cela impliquait :

  • Eliminer les obstacles sur les plages, qui étaient exposés à marée basse, afin qu'ils ne constituent pas un danger à mesure que la marée montait,
  • Désarmer et retirer les mines et autres charges explosives de ces obstacles,
  • Franchir la digue, là où il y en avait une,
  • Créer et entretenir des rampes et des voies d'accès fermes à travers le sable mou au-dessus de la ligne de la marée haute,
  • Retirer les véhicules immobilisés qui obstruaient ces sorties.

Quant aux unités de la 30th Armoured Brigade, elles avaient en charge de détruire toutes les mines sur leur passage, dégageant ainsi les voies de circulation jusqu'à la sortie de la plage.

Tout cela devait se faire sous le feu des bâtiments situés sur le front de mer, et sous le feu des mortiers et de l'artillerie venant de l'intérieur des terres. Plusieurs sorties étaient ouvertes moins d'une heure après les premiers débarquements, permettant aux brigades blindées de commencer à se déplacer vers l'intérieur des terres.

La bataille de Normandie et la suite de la guerre

Tout comme pour le débarquement sur les différentes plages Normande qui revenaient aux armée Britannique et Canadiennes, les véhicules de la 79e Division Blindée étaient répartis en petites unités entre les divisions participant aux opérations ultérieures au débarquement, dont la bataille de Normandie et l'opération Goodwood autour de Caen.

Au début, des difficultés ont été rencontrées pour persuader les commandants d'infanterie d'utiliser au mieux les blindés spécialisés, mais elles ont été résolues avec la nomination de représentants du GOC (General Officer Commanding) dans chaque formation où des éléments étaient affectés. Les unités du 79e étaient distribuées comme moyens à court terme à une opération ou bataille particulière et une fois terminées retournaient à la 79e Division Blindée, les officiers de liaison du 79e ayant le pouvoir de rappeler les véhicules.

Le Premier Ministre Britannique Sir Winston Churchill et le Field Marshal Bernard Montgomery rendent visite aux hommes de la 79th Armoured Division, le 01 Mars 1945

La division a ensuite été utilisée lors de la bataille de l'estuaire de l'Escaut (opération Infatuate), de la bataille du triangle de la Roer (opération Blackcock), des passages du Rhin (opération Plunder) et de l'Elbe pour transporter les troupes d'assaut et se réapprovisionner.

La 79e Division Blindée fut dissoute le 20 août 1945.

Organisation de la 79e Division Blindée Britannique à partir de Septembre 1944

LES CHARS DE DEMINAGE A FLEAU

Né dans le désert

Bien positionné, un champ de mine peu transformer une vaste surface de désert en une zone impénétrable par des forces mobiles, contraignant ces dernières à emprunter un couloir qui les conduit directement sur les défenses adverses. C'est sur constat que née l'idée d'utiliser des engins de déminage dans l'esprit des forces britanniques repoussées au-delà de la frontière Egyptienne face à l'avancé de l'Afrika Korps de Rommel après la prise de Tobruk en Août 1942.

Le premier concept de véhicule fléau fût mis au point par le No.4 Ordnance Workshop. Un étrange dispositif fabriqué à partir d'un châssis de camion Canadian Ford coupé de façon à ne conserver que le moteur, la transmission et l'essieu arrière. A la place des roues, aux deux extrémités de l'essieu, des fûts sur lesquels des longueurs de chaines, de câble et de cordes étaient fixées. En fonctionnement, ce dispositif était suspendu à l'avant d'un autre camion, venant battre le sol pour faire exploser les mines sur le chemin de roulement du véhicule.

Les premiers véritables chars spécialement équipés d'un système de déminage à fléau sont les Matilda Scorpion flail tanks qui ont participés à la deuxième bataille d'El Alamein en 1942. Ce char a été conçu par un officier sud-africain, le major Abraham S. J. du Toit. Il était équipé d'un tambour rotatif monté sur une structure fixe à l'avant du char. Ce tambour était entrainé par un volumineux moteur externe positionné sur le flanc du char.

 

Matilda Scorpion flail tank, 5 Novembre 1942

Le système scorpion fût également adapté sur d'autres chars contemporains du Matilda, parmi lesquels le M3 Grant Américain utilisé notamment en Sicile en 1943,

le Valentine qui avait la particularité de ne plus avoir de tourelle, l'emplacement étant réservé au moteur qui entrainait le fléau.

Grant Scorpion flail tank, Sicile 1943
Valentine Scorpion flail avec le moteur du fléau positionné à l'emplacement de la tourelle

Le Sherman Crab

Comme nous venons le voir, le principe de déminage par fléau monté sur des véhicules blindés est déjà rependu au sein des armées alliées.

Sir Percy Hobart utilisa donc ce retour d'expérience des Scorpions pour affiner le concept et mettre au point le Sherman Crab en 1942.

Parmi les points notables du Crab, on peut citer:

  • Des bras articulés pour permettre de manœuvrer du tambour rotatif en azimut,
  • Un entrainement du tambour rotatif directement connecté au moteur principal du char,
  • Une répartition uniforme des chaînes sur le tambour,
  • Une protection améliorée du char hôte contre les explosions des mines,
  • Conservation d'une tourelle active avec son canon.

Le Crab est mis au point sur la base du principal char des forces alliées en cette année 1942, le M4 Sherman, permettant ainsi de disposer de beaucoup de véhicules à convertir mais également un gros stock de pièces détachées pour la maintenance de ces chars qui seront en premières lignes.

Pour l'aspect négatif, le système de déminage monté a l'avant du char rallongeait considérablement ce dernier (8,4m) ce qui limitait le rayon de braquage du char ainsi que ses capacités de franchissement des fossés.

Deux versions seront construites, le Sherman Crab MkI qui reçut la désignation de "Mine Exploder T2 Flail" et le Sherman Crab MkII désigné "Mine Exploder T4". Celles-ci ont été construites sur des différents modèles de production du Sherman.

Uniquement mis en œuvre par les Britanniques dès les premières heures du Jour J, le Sherman Crab n'avait pas été retenu par l'US Army. Ces derniers jugeant que le véhicule manquait de mobilité, ce qui signifie qu'il était trop lent, qu'il manquait de fiabilité mécanique et présentant une sensibilité au terrain. Cependant suite à un support remarqué, apporté au 743rd Tank Bataillon le 26 Février 1945 par deux Crabs Britanniques, une poignée de Sherman Crabs furent remis aux Américains et intégrés au 739th Tank Bataillon.

Méthode de déploiement

Un groupe de Sherman Crab était composée de cinq chars, étant donné que pour dégager un chemin de 7,3 m de large à travers un champ de mines, trois chars seraient requis, plus deux autres attendant en bordure pour remplacer les éventuels chars endommagés et fournir un appui feu entre-temps. Les trois chars en actions avançaient sur le champ de mines avec un léger décalage. Un très haut niveau de conduite était nécessaire pour s'assurer que les chars ne s'écartent pas de leur trajectoire. La poussière ou la boue soulevée par les chaînes agitées était presque impénétrable jusqu'à la hauteur de la tourelle, de sorte que le conducteur devait s'appuyer sur les dispositifs de maintien en position surélevés du char de devant.

Ecorché d'un Sherman Crab. Source: OSPREY Publishing

1 Prise d'air

2 Bâche

3 Support de chaîne de rechange

4 Remplissage du réservoir de carburant gauche

5 Remplissage du radiateur

6 Coffre de rangement tourelle

7 Habitacle de boussole rétracté

8 Habitacle de boussole déployé

9 Base aérienne « B »

10 M2 Browning 50-cal.

11 Base aérienne 'A'

12 Trappe du chef de char

13 Viseur à girouette

14 Canon M3 de 75 mm

15 Coupe-fil rotatif latéral

16 Ventilateur

17 Traverse et bouclier du foc à fléaux

18 Tambour du rotor à fléaux

19 Point d'attache de la chaîne du fléau

20 Pignon conique pour l’entraînement du tambour rotatif

21 Chaîne à fléaux

22 Déflecteur de câble

23 Arbre d'entraînement du fléau

24 Couvercle d'arbre d'entraînement de fléau

25 Flèche latérale droite

26 Vérin élévateur de flèche

27 Barbotin

28 Support de reprise de flèche côté droit

29 Capot blindé pour boîte d’engrenages d'entraînement arrière

30 Boîte d’engrenage d'entraînement arrière

31 Carter supérieur d'entraînement

32 Siège du radio

33 Carter inférieur d'entraînement

34 Prise de mouvement du tambour

35 Casier de couverture du canon de 75 mm

36 Siège conducteur

37 Levier d'activation du fléau

38 Unité de suspension

39 Arbre d'entraînement principal

40 Rangement pour munitions de mitrailleuse

41 Siège du chargeur

42 Panier de tourelle

43 Roue tendeuse

44 Feu arrière

45 Chenilles à chevrons en acier

46 Panneau supérieur d’accès moteur

47 Portes d'accès moteur

48 Crochet de remorquage

49 Support de montage de la roue tendeuse

50 Anneau de levage

SPECIFICATIONS

Equipage : 5
Poids au combat : 34 tonnes
Longueur totale : 27 pieds 8 1/2 pouces (8,4 m)
Largeur : 11 pi 11 1/2 po (3,6 m)
Hauteur : 9 pieds 10 pouces. (3m)
Moteur : Chrysler A57 multibank
Transmission : synchronisée à cinq vitesses et contrôlée direction différentielle
Capacité de carburant : 160 gallons
Profondeur du gué (non préparé) : 42 po. (1,7 m)
Armement : M3 75 mm, 2 x M1919 Browning .30-cal., M2 Browning .50-cal. mitrailleuses
Rangement de munitions : 74 cartouches de 75 mm, 17 boîtes de .30-cal. et 5 boîtes de .50-cal.
Vitesse initiale : 2 030 pieds (619 m) par seconde
Portée effective : 3 500 yards (3 200 m)
Élévation/dépression du canon : +25/-10 degrés
Vitesse : 20 mph (32 km/h)
Vitesse de battage : 1,5 mph (2,4 km/h)

Cas typique d'emploi d'un groupe de Sherman Crabs. Trois chars réalisent le déminage du terrain avec l'appui feu des deux autres chars qui peuvent être amené à remplacer un éventuel char endommagé parmi les trois en action. Source: OSPREY Publishing

LE PONT BAILEY

Second protagoniste de ce projet et du diorama à venir, le pont Bailey mérite qu'on s'y attarde un peu.

Sources: Wikipédia et d’après l’article de G. Stefanini paru sur le bulletin de l’Association musée du Génie d'Angers - décembre 2012 

Le pont modulaire en acier 

Le pont Bailey, porte le nom de l’ingénieur civil Donald Bailey qui en fût l'architecte au sein du "Experimental Bridging Establishment", structure d'ingénierie militaire rattachée au War Office, le ministère de l'Armée Britannique. Ce pont modulaire en acier fût utilisé à très grande échelle sur divers fronts au cours de la seconde guerre mondiale: en Afrique du Nord, en Italie (2500 exemplaires) et en Europe du Nord (1500 exemplaires).

Donald Bailey travaillant sur une maquette d'une section de pont modulaire

Présenté pour la première fois le 1er mai 1941, le pont Bailey apporte une solution efficace à des spécifications imposées contraignantes afin de répondre à un besoin de pont modulable pour accompagner le futur char lourd d’infanterie, le Churchill, alors en expérimentation. De ce fait, le cahier des charges exigeait la confection d'un pont polyvalent, modulable en portée (jusqu'à 60 m sans appui) et en charge (jusqu'à 70 tonnes). Le montage devait en être facile et rapide, sans utilisation de moyen mécanique, l'ensemble devant pouvoir être démontable et transportable à bord de camions militaires standards. Plusieurs bureaux d'études étaient en lice et c'est finalement l'"Experimental Bridging Establishment" à Christchurch qui l’emporta grâce à l’ingénieur Donald Coleman Bailey.

Le prototype toujours accessible du pont Bailey érigé au dessus de Ma Sillar's Channel dans la réserve naturelle de Stanpit Marsh, à proximité de Christchurch dans le Dorset.

La supériorité du pont Bailey réside dans la simplicité de sa conception qui permet la construction d’un pont de 60 mètres pouvant recevoir des charges de plus de 50 tonnes par l’assemblage manuel de pièces métalliques préfabriquées sans aucun moyen mécanique d’assistance. Deux heures suffisent à 40 sapeurs pour installer un ouvrage basique de 20 mètres de long.

Véritable mécano qui se monte avec l’aide du Technical Manual, le Bailey est d’une relative facilitée d’assemblage grâce aux boulons, broches ou étriers. Le panneau de 5 pieds sur 10 (1,549m x 3,048m) pesait 272 kg, six hommes le déplaçaient avec des barres de portage. La pièce de pont, élément le plus lourd pesait 280 kg. Le chemin de roulement, le platelage était en madriers. L’assemblage des différents éléments forme un tronçon de 10 pieds (3,05 m). En multipliant et raccordant les tronçons on obtient un pont de la longueur nécessaire au franchissement de la brèche. Sept combinaisons étaient réalisables en fonction de la charge et de la portée. Il y avait le montage simple simple (S-S), double-simple (D-S), triple simple (T-S), double-double (D-D), triple-double (T-D), double-triple (D-T) et triple-triple (T-T).

Tous les éléments constitutifs du pont Bailey
Les différentes configurations de montage du pont Bailey

Une ou deux passerelles extérieures fixées le long du pont facilitaient le franchissement de la troupe en toute sécurité, sans encombrer le chemin de roulement.

Le pont était lancé par poussage selon deux modes opératoires :
- Construit entièrement sur une rive, il était ensuite poussé d’un bloc sur des rouleaux jusqu’à ce que la structure ait pris appui sur l’autre rive,
- Construit tronçon après tronçon il était poussé progressivement sur la brèche en faisant attention à ne pas dépasser le point d’équilibre.
Les rouleaux étaient alors retirés à l’aide de gros crics hydrauliques servis chacun par une ou deux personnes et le pont est posé sur ses éléments d’appuis définitifs.

Méthode de lancement d'un pont construit depuis une seule rive

Le pont Bailey pouvait être déployés directement entre deux rives ou bien s’appuyer sur les piles d’un pont détruit, sur des caissons ou des bateaux réglementaires du génie, tels les M25 américains.

Sections de pont Bailey posées sur des barges

L’invention du Bailey séduisit les Américains qui, sous licence, en 1942-1943 construisirent leur propre modèle désigné M2. Le modèle américain différait du Bailey anglais par une largeur supérieure de 0,58 m. Des variations étaient également visibles dans la fabrication des poutres, des panneaux ; raison pour laquelle le poids du panneau varie sensiblement. Les Français utilisèrent indistinctement les modèles britannique et américain. Le modèle ‘’M1’’ est probablement une nomenclature française permettant de différencier les modèles.

Durant toute la Seconde Guerre mondiale, près d'un demi-million de tonnes d'éléments de pont seront produits. Le général Eisenhower considérait le pont Bailey comme une des trois armes révolutionnaires du conflit avec le radar et le bombardier lourd. Donald Bailey sera anobli pour cette invention.

Après la Seconde Guerre mondiale, les USA, la Grande-Bretagne et la France modifièrent la largeur de leurs ponts Bailey pour l’utilisation des chars lourds comme les M 26 Pershing, M 47 Patton ou Centurion anglais. Le Génie français utilisera vers les années 1950 le Bailey type F.F.A. (Forces Françaises en Allemagne), élargi à 3,95 m. Les armées britanniques et américaines ont abandonné les Bailey au début des années 2000, remplacé par le modèle Mabey-Johnson. L’armée française en détient encore quelques uns. Une réserve est constituée au Centre national des ponts de secours, organisme civil dans l’est de la France.

LE MONTAGE DES MAQUETTES

L'INVENTAIRE DES MAQUETTES

Voici la liste et les références des boîtes de maquette et sets d'amélioration utilisés pour la constitution de ce diorama.

Note: Le montage étant en cours, cette rubrique est sujette à évolution au fur et à mesure de l'introduction de nouvelles références pour ce montage.

LE SHERMAN CRAB

LE BAS DE CAISSE

La toute première étape de ce montage est dédiée à l'assemblage des six bogies. Constitués de douze pièces, ces derniers sont très bien détaillés. On notera entre autres la texture et les marquages de fonderie sur la face externe des boitiers de suspension et des bras de suspension.

Il y a malgré tout de la place à quelques améliorations. Il faut tout d'abord reprendre la jonction entre les deux demi-coques des boitiers de suspension. Celle-ci est retravaillée au mastic fait maison (morceaux de grappes fondus dans de la colle liquide). Le choix de ce mastic fait maison, ici en vert répond au besoin de reproduire la texture de fonderie sur la face supérieure des boitiers. Ce qui nous conduit à la seconde amélioration, après un ponçage pour retrouver la planéité, je passe une fine couche de colle liquide sur la surface concernée, je tapote cette dernière avec un pinceau à poil rigide (soie de porc) afin de restituer l'effet de fonderie. Je réalise cet effet très léger afin de correspondre à celui fait par Dragon sur le reste du boitier.

Dernière amélioration, les quatre têtes de vis qui maintiennent les guides de chenille supérieurs sont étrangement absentes sur les pièces du kit. Je reproduis celles-ci avec de la carte plastique passée au punch and die hexagonal.

Je profite d’avoir le punch and die sorti pour reproduire les deux petits bouchons de graissage des roues tendeuses.

La caisse inférieure n’appelle pas de modifications particulières. Seule précaution à prendre c’est la configuration de la face arrière de cette caisse. Certains équipements proposés par Dragon ne devront pas être montés afin de correspondre à mes images source.

La notice Dragon doit être scrupuleusement analysée car elle comporte hélas quelques erreurs. Ici le sens de montage des supports des roues tendeuses. Il faudra intervertir les pièces de gauche et de droite afin de retrouver le bon sens de montage. Le bon montage s’identifie par le nombre de fixation entre chaque raidisseur en gardant en mémoire que la seule rangé double doit être en avant dernière position de haut en bas.  Un peu de mastic sera nécessaire pour parfaire la jonction de la caisse juste au-dessus de ces ferrures.

Tout est prêt pour la suite. Les bogies ne sont pas collés sur la caisse afin de faciliter la mise en peinture.

LA CAISSE SUPERIEURE

En ce qui concerne la caisse supérieure, le kit Dragon est assez bien détaillé, on y retrouve la texture de fonderie des plaques du glacis avant, des cordons de soudure, les traces de découpe sur les épaisseurs des tôles ainsi que quelques marquages de fonderie en relief. Cela dit, il y a de la place à l’amélioration.

Tout d’abord le carter de transmission, qui sur mon modèle sera du type boulonné avec ces trois parties moulées et jointes entre elles par des brides. Les pièces du kit lisses sont traitées au Mr. Surfacer 500 pour restituer la texture de fonderie. Ce traitement m’oblige à éliminer les marquages de fonderie présents sur ces pièces. Ces derniers sont donc refaits à l’aide d’une planche de décals en relief de chez Archer. Je profite de la même pour faire les marquages oubliés par Dragon sur le glacis avant et entre les deux trappes du pilote et du radio.

Comme évoqué plus haut, Dragon restitue bons nombres des cordons de soudure, cependant en comparaison de photo d’engins réels conservés en musée, je trouve que ces derniers manquent d’un peu de relief. Je décide donc de les refaire au mastic bi composants Tamiya, les gravures sont faites soit à la lame x-acto soit avec le bout d’une aiguille de seringue selon le type de soudure. Des têtes de boulons hexagonales sont faites en carte plastique et au punch & die pour détailler le bas de caisse au niveau du raccordement avec le carter de transmission.

Avec l’appui de photos historiques, je décide d’installer un coffre sur le glacis arrière. Même si le Sherman A4M4 n’en disposait pas, fort heureusement Dragon fourni ce dernier dans sa boîte qui dispose de grappes communes pour toute la série de Sherman, y compris un Firefly. Les attaches sont faites en scratch et les loquets en photo découpe. Toujours à l’aide des photos, je refais à l’aide de carte plastique la boîte de premier soin localisée à la droite du coffre. Il est à noter que sur la plupart des Sherman Crab, les deux écopes de ventilation du moteur situées à l’arrière de la caisse sont orientées vers l’arrière et non vers l’avant come sur le reste des Sherman. Ceci était certainement fait pour éviter l’ingestion de la poussière générée par l’action du fléau qui battait le sol à l’avant du blindé.

La tourelle est constituée de deux pièces principales, le joint entre les deux pièces bien visibles sur la nuque de tourelle est soigneusement poncé bien la texture de fonderie très bien restituée sur ces pièces est retravaillée dans un premier temps avec de la colle liquide Tamiya, puis avec du Mr. Surfacer 500 en finition. Le coffre de tourelle, typique des Sherman britanniques provient du set de conversion Legend. Seules les têtes de boulon seront refaites avec un punch & die et de la carte plastique. Ici aussi les marquages en relief Archer sont mis en œuvre.

Suivre Cocagne:
J'ai 43 ans, je vis dans le Tarn, à mi-chemin de mon Toulouse natal et d'Albi. J'ai commencé la maquette à l'adolescence dans la continuité des LEGO de ma jeunesse. Je suis membre d'un club et je participe à des expos dans le sud ouest essentiellement. Mes centres d’intérêts sont variés, du militaire au 1/35 WW2 et un peu de moderne, du warbird au 1/32 et du jet au 1/48.
Derniers billets de
4.3 16 votes
Évaluation de l'article
S’abonner
Notification pour
guest

7 Commentaires
Commentaires en ligne
Afficher tous les commentaires
Floppy
Auteur D2MM
14 janvier 2024 18h29

Bravo et Merci pour cet Article bien complet avec plein d’informations très intéressantes, j’espère tout autant que les maquettes qui vont suivre seront aussi belles et magnifiques qu’a ton habitude, je vais te suivre avec toute mon attention. Merci et bonne continuation à nous faire rêver.

Dernière modification le 6 mois il y a par Floppy
Laurent074
Invité
Laurent074
12 janvier 2024 17h56

Belles présentation et historique de ton projet.
Ceci augure le meilleur pour la fin de ton article, ton diaporama !

Jacques Petyt
Auteur D2MM
10 janvier 2024 21h30

Alors Thomas, génial ton historique de plus il me suit avec le canal de l’orne, j’ai hâte de voir la suite du projet encore félicitations pour ce travail.

Martial HELLO
Invité
Martial HELLO
10 janvier 2024 17h43

Voilà qui est génial, les crabs sont en forces sur D2MM. Je vais me sentir moins seul. Découvrant les maquettes militaires, je vais suivre ton article comme un môme sur les banc de l’école.

Julien Waltregny
Auteur D2MM
10 janvier 2024 10h22

Un superbe article que tu nous présente ici Cocagne, j’ai hâte de lire la suite!

Julien Waltregny
Auteur D2MM
10 janvier 2024 10h21

Un superbe article que tu nous présente ici Cocagne, j’ai hâte de lire la suite!

Dernière modification le 6 mois il y a par Julien Waltregny
Propeller63
Auteur D2MM
7 janvier 2024 23h56

Salut Thomas Je suis pas blindeux mais j’adore ces engins atypiques…Bon montage !